Entretien avec Bertrand Besancenot, Ministre plénipotentiaire Conseiller diplomatique du gouvernement
Bertrand Besancenot, arabophone et spécialiste des pays du Golfe, est Conseiller diplomatique du gouvernement. Il a été missionné par le Président de la République pour assister la médiation koweïtienne en favorisant le dialogue dans la crise qui oppose le Qatar aux pays arabes du Golfe. Revenant sur les évolutions de cette crise, il nous précise le poids de l’Arabie saoudite dans la région, et évoque les objectifs poursuivis par Emmanuel Macron, qui mène dans cette partie du globe une diplomatie active.
Propos recueillis par Clément Airault © Clément Airault

L’Essentiel des relations internationales : Monsieur le Conseiller, le Président de la République française a fait des pays du Golfe l’une de ses priorités sur le plan diplomatique. Quels sont ses objectifs, notamment en Arabie saoudite ?
Bertrand Besancenot : La première des priorités de la politique étrangère française est clairement l’Europe. L’Afrique, y compris l’Afrique du Nord, est par ailleurs une zone traditionnelle d’influence et de coopération privilégiée. Mais nous avons également avec les pays du Golfe une relation ancienne de confiance. La France dispose d’une base militaire à Abou Dhabi, ce qui montre bien que nous accordons de l’importance à cette région stratégique.
D’autre part, les pays du Golfe sont des marchés porteurs. Malgré la chute des cours du pétrole, des opportunités nouvelles se créent du fait des réformes en cours dans l’ensemble de ces pays. Un véritable effort de diversification économique et de diversification des investissements a été engagé, notamment en Arabie saoudite. De nouveaux secteurs culturels et touristiques se développent.
En aval des hydrocarbures, une série d’industries peuvent se créer avec l’objectif de moins dépendre des contrats d’État, et de s’appuyer beaucoup plus sur le secteur privé. Vous avez en Arabie saoudite des grands groupes privés, souvent familiaux, qui ont des moyens considérables et peuvent saisir ces opportunités pour prendre le relais. On s’oriente de plus en plus vers des partenariats public-privé, avec la recherche de partenaires étrangers qui peuvent être des pourvoyeurs de technologie.
Les ventes d’armes françaises sont-elles donc amenées à réduire, au profit d’une diversification des marchés ?
L’Arabie saoudite a été durant longtemps notre premier acheteur d’armement. Aujourd’hui elle est le second derrière l’Inde. Elle reste un partenaire important, mais les ventes d’armes ne constituent pas la majeure partie de nos échanges. Au cours des quatre dernières années, sur 25 milliards d’euros de contrats signés par les entreprises françaises en Arabie saoudite, sept l’ont été dans le domaine militaire et le reste dans le domaine civil. Les transports en particulier, avec Airbus, mais aussi les secteurs de l’eau et de l’électricité sont dynamiques. Et toute une série de nouvelles opportunités se créent aujourd’hui : santé, agroalimentaire, tourisme, animation culturelle…
Il existe en Arabie saoudite une préoccupation majeure, qui est l’emploi des jeunes. Dans ce pays de plus de...